BOURGTHEROULDE - GUERRES & EVENEMENTS : la guerre franco-prussienne de 1870 / 1871

LA GUERRE FRANCO-PRUSSIENNE DE 1870 / 1871

 

    

            La guerre franc-prussienne de 1870/1871 est une guerre dont on parle peu. Elle a été supplantée par les deux guerres mondiales plus récentes et beaucoup plus meurtrières. De plus, la France a essayé d'effacer, d'oublier sa cuisante défaite.
            La guerre franco-prussienne de 1870-1871 est un conflit qui opposa la France et les états d'Allemagne sous la domination de la Prusse. La guerre franco-prussienne de 1870-1871 fut une guerre courte (à peine six mois) qui se déroula de la mi-juillet 1870 jusqu'à la fin janvier 1871. toutes les batailles de la guerre franco-prussienne de 1870-1871 eurent lieu en France sauf la première.
            La publication de la dépêche d'Ems par Bismarck déclenche la guerre franco-prussienne de 1870-1871. En France, le 15 juillet, les crédits pour la guerre franco-prussienne de 1870-1871 étaient accordés et la guerre déclarée quelques jours plus tard. La guerre franco-prussienne de 1870-1871 peut être divisée en deux périodes : la Guerre Impériale et la Guerre Républicaine (ou de la Défense Nationale).
            La période impériale de la guerre franco-prussienne de 1870-1871 d'une durée d'un mois et demi environ vit la perte de l'Alsace, l'invasion de la Lorraine, et le siège de la ville de Metz. La désastreuse bataille de Sedan, tournant de la guerre franco-prussienne de 1870-1871, amena la chute de l'empire et la proclamation de la République. Pendant cet épisode de La guerre franco-prussienne de 1870-1871, l'armée de Paris eut à subir le siège de la ville ainsi que son bombardement. Les armées de province essayèrent de dégager la capitale et de couper les lignes d'approvisionnement de l'armée allemande. La guerre franco-prussienne de 1870-1871 prit fin avec la capitulation de Paris. le 28 janvier 1871.
             A la suite du traité de paix de Francfort, qui met fin à la guerre franco-prussienne de 1870-1871, signé le 10 mai 1871, la France perd l'Alsace (sans Belfort) et d'une partie de la Lorraine (avec Metz), intégrées à l'empire allemand en tant que "territoires d'empire". De plus, cinq milliards en francs or devaient être payés par la France, une armée d'occupation devant rester sur une partie du territoire jusqu'au versement complet de la somme. Après la guerre franco-prussienne de 1870-1871, Napoléon III s'exila en Grande-Bretagne où il rejoignit sa famille.

(source : Internet)

Bourgtheroulde est le quartier général des Mobiles et des troupes prussiennes. Une ambulance (infirmerie) est établie dans la mairie.

Georges Dubosc – La Guerre de 1870/1871 en Normandie –    

Imprimerie du Journal de Rouen - 1905.

 «Combats de Bourgtheroulde (4 janvier 1871) -  Poursuivant son action en avant, immédiatement après qu'il se fut emparé de la Maison Brûlée et du carrefour de la forêt, l'ennemi dirigea une forte colonne de 3.000 hommes de la brigade de Bentheim sur le Bourgtheroulde. Ainsi qu'il était facile de le prévoir, le général Roy, pour avoir négligé d'occuper complètement la forêt de La Londe, allait se voir coupé de ses ailes, resté seul, sans communications avec la colonne du lieutenant-colonel Thomas (…)

Les troupes occupant Bourgtheroulde, placées en seconde ligne, étaient considérées comme une réserve destinée à renforcer, suivant les péripéties de l'action, les positions de Château-Robert (château Robert le Diable à Moulineaux) et d'Orival. De plus, elles devaient garder les approvisionnements concentrés dans ce bourg, où rien n'avait été établi pour une défense, difficile il est vrai, étant donnée sa situation en plaine. Les troupes en réserve à Bourgtheroulde se composaient des 1er et 3ème bataillon du 39ème Mobiles de l'Eure (…) A Bourgtheroulde se trouvaient également la compagnie des francs-tireurs du Calvados (capitaine Pascal), les Guides à cheval du Calvados (capitaine Duval) et un peloton de chasseurs arrivés la veille.

Depuis quatre heures du matin, au milieu d'un intense brouillard, une vive fusillade se faisait entendre, qui se rapprochait d'instant en instant (…) Pendant ce temps, le général Roy, logé à Bourgtheroulde, ne semblait pas se préoccuper vivement de la situation devenue menaçante. Craignant un bombardement, les habitants s'enfuyaient ou se réfugiaient dans les caves. A un moment donné, d'une des fenêtres du logis occupé par le général Roy, écrit M. P. Duchemin dans son « Histoire du Bourgtheroulde » (Pont-Audemer, 1888), on aperçut un peloton de Prussiens arrivant au pas de course. Pour ne pas être pris, le général Roy eut à peine le temps de se lever, abandonnant ses papiers et ses cartes dans un désordre complet. On les jeta au feu et on fit bien, car quelque temps après, le commandant allemand se présentait, croyant faire prisonnier le général français (…)

Menacées d'être tournées, les troupes françaises qui, à un moment, poussèrent une contre-attaque à la baïonnette, sont obligées de se retirer sur le Bourgtheroulde (…) Déjà la Grande Place du Bourgtheroulde, écrit M. A. Montier dans son intéressant « Historique du 39ème Mobile de l'Eure », est sillonnée par les balles, et bientôt elles arrivent aussi par la route d'Elbeuf. L'ennemi, en effet, a pu se faufiler entre le bourg et les compagnies du 1er bataillon qui tiennent la position de ce côté. De plus en plus, il apparaît que la petite colonne française est cernée.

Alors on se décide à se replier, tandis qu'ordre est donné au commandant Guillaume du 1er bataillon (ancien maire de Fours) de tenter un dernier effort dans Bourgtheroulde même et de défendre coûte que coûte la route de Brionne, par laquelle doit s'effectuer la retraite (…) Pendant une heure, 40 soldats, ralliés par les capitaines de Rostolan et De La Brière, le lieutenant Roussel, vont tenir tête à la colonne allemande.

           Cependant, les fantassins allemands aux ordres du capitaine De La Busse, retranchés au nord de la place, occupent la halle située en face de l'église, la célèbre collégiale. Leurs feux convergents, et particulièrement le feu oblique qu'ils dirigent de ce dernier point, rétrécissent singulièrement l'espace occupé par une poignée d'hommes. C'est à vingt mètres à peine qu'on se fusille ! (…)

Enfin toute cette héroïque arrière-garde qui tenait en respect une troupe beaucoup plus supérieure en nombre, put se retirer, dit l'auteur des « Souvenirs d'un Mobile du Vexin », à la faveur d'un brouillard qui redoubla tout à coup d'intensité (…)

Immédiatement, la colonne allemande aux ordres du colonel De La Busse et du premier lieutenant Du Lichmelin (43ème régiment d'infanterie et 44ème) occupa le Bourgtheroulde pendant deux mois. Les Allemands firent du village, qu'ils qualifiaient de « nœud de routes » un véritable camp retranché. Sûrs de ne pas être inquiétés, ils se livrèrent à mille exactions. Toutes les maisons furent fouillées de fond en comble, et le mobilier des absents pillé et détruit. Deux femmes, au cours de ces perquisitions, moururent de frayeur.

La mairie où se trouvait une ambulance (infirmerie) fut envahie et les malades et les blessés français qui s'y trouvaient, faits prisonniers. Le maire, M. Bouquet, inculpé d'avoir logé les « Eclaireurs de Normandie » fut garrotté et emmené en otage jusqu'à Grand-Couronne, où il fut emprisonné dans le confessionnal de l'église. Maltraité et brutalisé M. Bouquet fut ensuite amené à Rouen en même temps que six autres prisonniers et jeté dans les cachots du Palais de Justice, ainsi qu'il l'a raconté dans ses « Souvenirs de l'invasion allemande dans le canton de Bourgtheroulde » (Lisieux – E. Poutrel. 1888). Il n'en sortit que grâce à l'intervention de MM. Nétien, maire de Rouen, et Amédée Delamare, adjoint.

Pendant sa captivité, M. Gruel, adjoint, remplit les fonctions de maire et eut à tenir tête aux réquisitions des Allemands enlevant le bétail, brûlant sur la place du Marché les munitions françaises, sacs, cartouches, oriflammes, dans un brasier dont le crépitement fit croire à un nouveau combat.

A son retour, M. Bouquet assura l'état sanitaire du pays en faisant débarrasser les rues des chevaux morts, des débris de viande partout abandonnés par l'ennemi. Il eut également à combattre vingt-cinq incendies qui, par suite de l'imprudence des soldats allemands, éclatèrent dans le bourg, particulièrement à l'hôtel de Rouen, à l'hôtel du Cheval Noir et à la maison Delamare (…)

 On avait dû également inhumer nombre de malheureux mobiles ; le corps du capitaine Pascal, inhumé dans le cimetière, fut remis quelques jours après à sa famille ». 

 

Souvenir de l'invasion allemande dans le canton de Bourgtheroulde par BOUQUET maire de la Défense Nationale 1870/1871 :

« Le 3 décembre  1870, M. le Sous-Préfet de Pont-Audemer m'adressait cette dépêche : « Je quitte à l'instant le général Briant. Rouen, Elbeuf, Le Havre sont résolus à se défendre, quoi qu'il advienne. Disposez votre garde nationale et tenez-vous prêt ». Je répondis : « Envoyez armes et munitions, faites vite et comptez sur moi ».

On avait enlevé nos armes quelques temps auparavant (…)

Le 26 décembre, nous reçûmes un convoi d'armes et de munitions, enlevé de cette dernière ville (Elbeuf), et escorté par des francs-tireurs et des soldats qui avaient pris part au combat devant Rouen. Parmi eux, s'étaient glissés, sous un déguisement, plusieurs soldats prussiens, ce dont quelques-uns se vantèrent chez moi un mois plus tard (…)

Le 8 décembre, vers deux heures de l'après-midi, nous eûmes la douleur de voir, pour la première fois à Bourgtheroulde, un détachement prussien, un peloton du 28ème chasseur. Les soldats qui le composaient traversèrent le bourg en criant : « Français ! Français ! » et redescendirent presque aussitôt.

L'officier qui les commandait mit pied à terre devant ma porte, me fit appeler et me demanda s'il n'y avait ni francs-tireurs ni troupes régulières dans le pays. Je lui répondis que je n'en savais rien. Il me déclara qu'il me rendait responsable en cas d'attaque et qu'il ferait mettre le feu au bourg pour se venger (…) Il m'obligea à faire publier l'ordre qu'il donnait aux habitants de lui remettre leurs armes à la Mairie, déclarant que le corps d'infanterie fouillerait les maisons et que, s'il en trouvait, il punirait sévèrement ceux qui auraient refusé d'obéir(…)

Il me fit le conduire au bureau de tabac où il réquisitionna tout ce qu'il put trouver et fit détruire le télégraphe par le sous-officier qui l'accompagnait (…) L'ennemi ne resta, d'ailleurs, ce jour-là, à Bourgtheroulde que le temps de prendre un peu de repos et de se faire servir quelques nourriture par les habitants (…)

            Le 15 décembre, vers dix heures du matin, une colonne prussienne venant de Beaumont le Roger, où elle avait été repoussée avec perte, arriva inopinément par la route du Neubourg (…) Un officier payeur me demanda immédiatement des vivres pour 3.000 hommes d'infanterie, de cavalerie et d'artillerie, et des fourrages pour 1.500 chevaux. Il me déclara, en outre, que les troupes allaient se loger comme elles l'entendraient : les sous-officiers marquaient, en effet, à la craie, le nombre de logement sur la porte de chaque maison (…) Il m'accorda (pour réunir les fournitures) jusqu'à trois heures de l'après-midi (…)

Le Conseil municipal, convoqué d'urgence, se réunit à la mairie, déjà envahie par les troupes. C'est au milieu des soldats prussiens qu'il fallait délibérer. Leurs physionomies, leurs chants, le bruit de leurs armes n'offraient rien de rassurant (…) Ce fut, du reste, la première et la dernière réunion du Conseil avant l'Armistice (…)

Le 16 décembre vers huit heures du matin, les troupes (prussiennes) se mirent en mouvement. A neuf heures, il en arriva, comme une avalanche, par les routes de Rouen, d'Elbeuf, de Bourg-Achard et du Neubourg(…) cavalerie, infanterie, artillerie (deux pièces), caissons, fourgons, ambulances ; puis cela se renouvela dans le même ordre dix-huit ou vingt fois (…) L'Etat Major vint se fixer à Bourgtheroulde où il resta jusqu'au 24. Toutes les habitations étaient envahies par les troupes ; on les y entassait le plus possible. La cavalerie envahissait les auberges, les fermes, jetant dehors les bestiaux pour loger les chevaux ; les maisons situées aux extrémités du bourg furent occupées par des postes nombreux et crénelées. Toutes les routes furent barricadées, les pommiers coupés, des tranchées furent faites dans les prés en plusieurs endroits ; un cordon de sentinelles fut établi dans la campagne tout autour du bourg et des grandes gardes dans les bois et sur les routes à 4 kilomètres de distance. Le cimetière (situé Clos du Chêne) formait un camp retranché : les murs en avaient été découverts et des pierres tumulaires (tombales) portées le long pour servir de marchepied (…) Quelques scènes de violence se produisirent, surtout dans les maisons où il y avait de jeunes soldats (…)

Dans la nuit du 23 au 24 septembre (…) il régnait dans l'Etat Major (prussien)une véritable panique. On avait réquisitionné des voitures qui stationnaient depuis plusieurs heures ; on préparait visiblement une fuite précipitée (…)

Ce même jour 24 décembre, une compagnie de mobilisés du Calvados (…) poussa une reconnaissance jusqu'à Bourgtheroulde et s'arrêta au milieu du village (…) Le lendemain, une compagnie de francs-tireurs de Rugles arriva à Bourgtheroulde à la nuit tombante (…) La compagnie s'était divisée en deux colonnes, l'une traversait le bourg par la rue principale, l'autre par la rue latérale. Ces deux colonnes se rejoignirent au bas du bourg et, malheureusement, tirèrent l'une sur l'autre, trompées par l'obscurité. Un homme tomba blessé  mortellement (…)

Nous vîmes enfin  arriver les éclaireurs du Calvados, Compagnie Trémant et Pascal et une subdivision de la compagnie Lumière, qui étudièrent et explorèrent les forêts, firent quelques prisonniers et tuèrent quelques soldats prussiens. Ce sont ces compagnies qui prirent la plus grande part aux combats qui suivirent et où Pascal (…) paya de sa vie dans une lutte héroïque en avant de Bourgtheroulde (…)

M'occupant de la formation d'une ambulance (infirmerie), je fis publier l'avis suivant : « Les habitants de Bourgtheroulde sont priés de préparer sans relâche de la charpie et de disposer du linge et des bandes pour les blessés, de donner leurs matelas et de porter le tout le plus promptement possible à la Justice de paix (salle au premier étage de la mairie). Je compte sur leur dévouement » (…)

Le 3  janvier, dans l'après-midi, un escadron de chasseurs (français) s'arrêta à ma porte(…)  L'un d'eux brisa la porte de ma pharmacie et coucha mon fils en joue (…) Je fis cependant publier la proclamation suivante : « Habitants de Bourgtheroulde, je vous prie et, au besoin, je vous ordonne de laisser vos maisons éclairées et chauffées toute la nuit et l'entrée libre, pour que les troupes puissent, à toute heure, trouver un abri. Je compte sur votre patriotisme et votre dévouement ; comptez sur le mien »

Le 4 janvier (…) arrivèrent en pleurant quelques officiers de la compagnie Pascal de Caen, suppliant qu'on sauvât leur capitaine, blessé qu'ils venaient de transporter à la mairie (…) Cette brave compagnie, forte d'une cinquantaine d'hommes, aidée d'une vingtaine de mobiles de l'Eure, appuyée aux fossés de la route de Rouen, n'abandonna le combat qu'après avoir été tournée par l'ennemi, à la faveur du brouillard (…) De son côté, le commandant Guillaume, à la tête d'une compagnie de mobiles, adossés au mur du presbytère, en face de la Mairie, soutenait une lutte héroïque contre l'ennemi beaucoup plus nombreux et était enfin forcé d'abandonner sa position en laissant plusieurs de ses hommes sur le terrain. Huit cadavres français et prussiens étaient sur la place (…) Pendant ce temps, beaucoup d'habitants fuyaient terrifiés, se jetant à plat ventre dans les fossés bordant la route, afin d'éviter les balles. Quand le combat eu cessé, une compagnie d'infanterie prussienne monta le bourg au pas accéléré (…) Un nombre considérable de prussiens et deux pièces d'artillerie étaient sur la place de la Mairie ; ils brûlaient les munitions prises sur l'armée française (…)

M. Bouquet, maire provisoire, est arrêté :

Je fus forcé de suivre à pied, entre deux soldats, le fourgon d'ambulance, lancé au trot des chevaux ! La route était couverte de neige, glissante ; j'étais en sabots et malade.

Un sergent le fait monter dans le fourgon. Emprisonné à Grand-Couronne puis à Rouen et M. Bouquet est remis en liberté. Il rentre à Bourgtheroulde.

A peine arrivé, mon premier soin fut de m'informer de l'état du pays (…) Beaucoup de personnes mourraient de faim. La frayeur était telle qu'on n'osait même pas toucher aux débris de bœufs jetés par l'ennemi dans la rue. Je fis porter immédiatement de la viande et du pain aux familles dont la détresse me fut le plus particulièrement signalée. Je fis publier un avis autorisant les habitants à s'emparer des débris de viande abandonnés (…) Je pus alors faire enfouir les chevaux morts dans l'Ecole des filles (…)

            Le 10 janvier (…) un incendie venait de se déclarer à l'hôtel de Rouen, dont le mur était  mitoyen avec ma maison (…) Presque aussitôt un nouvel incendie éclata à l'hôtel du Cheval Noir, puis à la forge voisine. D'autres encore. (…) Dans notre agglomération d'environ quatre-vingt maisons, plus de vingt-cinq incendies avaient éclaté depuis le commencement de l'occupation prussienne.

Quelques jours après le 12 janvier : Le colonel de hussards (prussien) (…) m'ordonna de verser immédiatement dix mille francs, de livrer en outre à ses troupes trente-deux sacs d'avoine, dis-sept kilos de pain et autant de viande, sans quoi il ferait brûler le pays et me ferait arrêter ensuite (…)

L'officier renonce à la réquisition en argent mais demande des vivres pour les hommes et les chevaux à condition que la ville soit tranquille.

A neuf heures, tout le monde devait être couché, les maisons fermées et les lumières éteintes (…) Le lendemain matin, je livrais à l'officier payeur 250 kilos de viande et autant de pain, mais pas d'avoine.

Le 29 janvier, je reçus du préfet prussien d'Evreux l'ordre du 13ème corps d'armée prussien d'envoyer à la Préfecture, avant le 7 février, le relevé des statistiques officielles de l'impôt versé annuellement, en temps de paix, par les communes du canton, et de lui faire parvenir le montant de cet impôt pour le mois de janvier. En cas de refus, le canton serait imposé d'une contribution, égale aux impôts de toute l'année, qu'il ferait lever par la force militaire (…)

Les maires du canton rédigent un refus collectif.

12 février : Un colonel prussien (…) vint et me dit d'un ton sévère qu'il fallait lui payer de suite 200.000 fr. sous peine d'être arrêté immédiatement (…) Je fis observer que les plus riches mêmes n'avaient plus d'argent, que la banque était fermée, les chemins de fer détruits et les finances de l'Etat paralysées (…) Il fixa la part de Bourgtheroulde à 19.000 francs (…) 

M. Bouquet et son adjoint M. Legendre sont emmenés comme otages à Elbeuf où ils retrouvent les otages des communes du canton, même de celles qui avaient payé la précédente contribution. Ils sont libérés. L'ennemi occupe toujours Bourgtheroulde.

Bourgtheroulde était alors occupé par un détachement de deux cents hommes du train, tous brigands, y compris le chef qui était aussi méchant que malhonnête homme. Le bourg était mis au pillage jour et nuit (…) Des luttes sanglantes avaient lieu tous les jours entre les habitants et les soldats du train (…) Leurs chevaux ayant été atteints du typhus, je tentais une démarche pour les faire conduire hors du village sans succès (…)

Fin de l'occupation : Pressé par le préfet prussien (…) je réunis ainsi (avec les maires du canton) la somme de 10.000 fr. et je partis pour Evreux, bien décidé à ne payer que si je ne pouvais faire autrement (…) où se trouvaient déjà les délégués de Beuzeville (…) l'ennemi avait évacué la ville et nous pûmes rapporter à nos commettants l'argent qu'ils nous avaient confié.

Nous étions le 7 mars. Ce jour-là nous apporta la délivrance. L'ennemi quitta Bourgtheroulde dans la matinée (…)

Le dernier soldat prussien quittait à peine le village que je vis s'arrêter à ma porte une voiture d'où descendirent deux voyageurs. L'un d'eux était un Américain, M. PARKER, délégué de la ville de New-York ; l'autre était Français et lui servait d'interprète. Ils avaient pour mission de porter secours aux communes les plus éprouvées par l'invasion  (…) Ils m'offrirent pour Bourgtheroulde la somme de 2.000 fr faisant observer que cette somme était offerte, non par le gouvernement des Etats-Unis, mais par la ville de New-York (…) J'adressai à la ville de New-York, par l'intermédiaire de la Légation américaine à Paris une lettre de remerciements dont copie fut publiée dans « l'Union Républicaine d'Evreux », et transcrite à la mairie de Bourgtheroulde sur le livre des délibérations.

 

Registre des délibérations du Conseil Municipal : Une réunion a lieu le 10 février 1871 après le départ des troupes prussiennes. Bouquet, maire, convoque le conseil municipal et douze habitants les plus imposés du bourg. Sont présents : Filoque, Delarue, Leclerc, Théroulde et Eugène Périnelle. La commune doit à Cressent, boulanger, du pain fourni aux indigents et aux troupes prussiennes sur réquisition pour un montant de six cent quarante-six francs et un centime. Le maire a fait différentes avances urgentes de soixante-sept francs soixante-dix. L'impôt à payer au préfet (prussien), soit un douzième de l'impôt revenant à l'état, s'élève à neuf cent vingt francs quarante-cinq centimes. Le maire propose un impôt au taux légal et garanti par la commune. Les conseillers municipaux et les personnes les plus imposées déclarent que la situation misérable du bourg ne permet pas de percevoir l'impôt exigé pour lequel, dans les circonstances actuelles, le concours du percepteur est absolument impossible. Les sommes versées à Cressent seront nécessairement remboursées. Mais ils sont d'avis à l'unanimité que le dit emprunt ait lieu tout de suite et donne au maire l'autorisation de le contracter, soit à la Fabrique de l'église, soit ailleurs. Le maire est autorisé à traiter cette affaire et à donner reçu au prêteur au nom de la commune.

Le 20 février, une commission est chargée de recenser les objets égarés pendant l'invasion prussienne.

Le 6 mars, le préfet prussien ordonne par observation de l'article 1er  du traité de paix le versement à la préfecture allemande d'un impôt direct de neuf cent vingt francs quarante-cinq centimes. Le conseil municipal se réunit assisté des habitants les plus imposés. La Fabrique de l'église offre un prêt de cinq cents francs au taux légal. Les habitants concernés, sauf Bouquet et Leclerc, s'engagent à fournir quarante-deux francs et cinq centimes. Ces sommes seront remboursées sur les fonds restant libres en fin d'exercice.

(M. Parker, citoyen américain, offre à la commune au nom de la ville de New-York deux mille francs en bons de banque pour venir au secours des victimes de la guerre à Bourgtheroulde. mention dans le registre des délibérations)

            Le préfet de l'Eure adresse cent francs le 31 mars pour aider les indigents. Cette somme est versée en salaire aux ouvriers nécessiteux travaillant sur les chemins communaux.

Le conseil municipal remercie MM. Gustave Lagny d'Elbeuf et Boscavitre de Caudebec lès Elbeuf pour leur aide. Ils ont été des interprètes précieux lors des réquisitions allemandes.

 Le 10 juillet 1871, le conseil municipal demande au préfet de l'Eure que les frais et dépenses de l'ambulance se montant à huit cent soixante-quinze francs trente deux centimes soient pris en charge par le département.

Les pertes et dégâts s'élèvent, sans les réquisitions, à plus de deux cent soixante-cinq mille francs. Les dépenses occasionnées par l'occupation prussienne supportées par les habitants dépassent les cent soixante-dix mille francs.

Le 14 août, la municipalité ayant convoqué les douze personnes les plus imposées du bourg, une seule se présente. Une nouvelle convocation est adressée et une deuxième séance a lieu. M. Dumouchel, adjudicataire des droits de places, désire obtenir une indemnité de mille cent  francs pour préjudices causés pendant l'occupation prussienne. Il reçoit  sept cent quatre-vingt-cinq francs. Une semblable réclamation est faite par M. Ledoc, fermier de l'octroi et adjudicataire de la halle boucherie, qui obtient deux cents quarante quatre francs. Ces sommes sont à défalquer sur les loyers de 1871.

Les membres du conseil municipal ne sont pas assez nombreux pour qu'une séance ait lieu le 24 août. Une nouvelle convocation est faite. La séance ordinaire peut se dérouler le 5 septembre. Il est fait mention de la réunion du 29 septembre 1870 : équipement, armement, soldes des mobilisés, ainsi que de l'emprunt fait à la Fabrique le 10 février 1871. Un nouvel impôt est impérieusement nécessaire. Le maire propose :

1) la création d'un impôt extraordinaire de six centimes du 1er janvier 1872 au 30 décembre 1875 qui devrait rapporter quatre mille deux cents francs

2) la prolongation pendant trois ans, jusqu'au 31 décembre 1873, de l'impôt de quatorze centimes servant au paiement intégral de la construction de la mairie.

M. Bouquet, maire provisoire pendant la guerre, expose longuement qu'il s'oppose à la levée de ces impôts extraordinaires et suggère de faire des économies sur les frais de bureau, le salaire du garde champêtre inutile, la remise de la souscription pour les canons restés sans emploi, celle pour les blessés… L'assemblée, à l'unanimité, sauf Bouquet, vote les différents impôts demandés par M. Vittecoq, maire.

Le 8 novembre, les impôts allemands et autres s'élèvent à mille six cent trente-quatre francs soixante-treize centimes.

Le conservateur des forêts adresse une réclamation le 25 mai 1872 à M. Vittecoq pour le paiement de quatre-vingt-douze francs pour bois fourni aux troupes françaises sur ordre du général Roy.

M. Grouvel, marchand de bois à Bosc Roger, se propose d'intenter une action contre Bourgtheroulde en juin 1872. Il exige le paiement de bois s'élevant à trois mille quarante-deux francs fournis en 1871 sous la responsabilité de M. Bouquet, maire, agissant à l'insu du conseil municipal. Une lettre du conservateur à la commission cantonale réduit le mémoire de M. Grouvel à deux mille six cent trente-cinq francs, une partie de la somme que ce dernier exige est comprise dans la première répartition des cent millions pour un montant de six cent quatre-vingt-trois francs vingt-cinq. Le conseil municipal décide que M. Grouvel doit subir le même sort que ceux qui ont eu des réquisitions.

 

Jugement  du 14 décembre 1872 ordonnant la transcription d'un décès. Acte numéro 2 du registre civil de Bourgtheroulde, année 1873 :

Décès de Brienne Adrien Joseph, clairon à la 2ème compagnie du 3ème bataillon de la Garde Mobile de l'Eure, décédé dans la salle de la mairie d'une blessure reçue en combattant contre l'armée prussienne et inhumé dans le cimetière du dit lieu. Par suite des circonstances, l'acte n'a pu être dressé. Sur les déclarations de Louis Odienne, aumônier du 3ème bataillon des Mobiles de l'Eure et lettre du 29 janvier 1871 du lieutenant de la Brière commandant les Mobiles de l'Eure. Adrien Joseph Brienne est décédé le 5 janvier 1871.

 

M. Dumouchel réclame des indemnités : il lui a été défendu d'emmener des bestiaux aux foires de cette commune pendant les événements. Une somme de deux cents francs lui est allouée en dédommagement le 31 mai 1873.

Le 25 juin 1873 est effectuée la répartition de la dernière indemnité aux victimes de la guerre. Lors de la précédente de l'an passé, les plus nécessiteux ont touché 25,90 %, les autres 15 %. Les non nécessiteux n'ont rien eu. Le conseil municipal décide que la deuxième catégorie recevra d'abord 10,93 % du montant de sa note, la troisième 25,93 %. Le reste de l'indemnité sera réparti au "marc" le franc entre toutes les victimes de l'invasion. M. Grouvel est payé pour le bois fourni sur réquisition de M. Bouquet.

            La créance due à M. Grouvel est enfin soldée par la vente de douze obligations de cinq cents francs chacune accompagnée de cent soixante-quinze francs de bons provisoires sur la somme de dix mille cent soixante-quinze francs accordée à la commune à titre de dédommagements des pertes éprouvées pendant la guerre.

Une somme de mille francs est votée en novembre 1873 pour l'élévation d'un monument sur la place de l'église commémorant les combats des mobiles contre les Prussiens du 4 janvier 1871. Les travaux seront traités de gré à gré avec un entrepreneur.

Le devis du monument à la mémoire des mobiles est de mille deux cents francs. Le conseil municipal décide le 6 mai de prendre cette somme sur l'impôt de mobilisation pour un montant de mille francs et le solde sur fonds libres.

 

(collection privée de M. TIPHAIGNE)

 

Un jugement fait à Pont Audemer le 17 octobre 1874 ordonne la transcription de l'acte de décès de Eugène Emile Daujean, né à La Barre en Ouche le 25 mai 1846, incorporé dans les Mobiles de l'Eure, soldat à la 4ème compagnie du 1er Bataillon, tué à l'ennemi en combattant le 4 janvier 1871 au lieu dit La Poterie. Attesté par De Boisgelin alors capitaine et Desbois alors sergent. Par suite de faits de guerre le décès du dit sieur Daujean n'a pu être constaté sur les registres de l'état civil de la commune de Bourgtheroulde sur lesquels le maire de cette commune déclare par un certificat en date du 6 décembre 1873 que les omissions ont été faites à la date ci-dessus indiquée.

 

Le 10 mai 1876, la commune rembourse sept cent treize francs soixante et onze centimes à la Fabrique de l'église. Cette somme avait permis de subvenir aux dépenses de première nécessité au moment de la guerre.

Le 6 janvier 1930, M. Albert Berthe, sergent de la "Vieille Garde", est autorisé, à sa demande, à prononcer un discours lors de la manifestation du Souvenir Français. (* Le Souvenir Français est une association créée en 1887. Elle a pour mission de perpétuer la mémoire de ceux qui sont morts pour la France et de transmettre la conservation de ce souvenir aux jeunes générations.)

 

 

 

 

 

 



22/05/2009
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